Council Regulation (EEC) No 3339/87 of 4 November 1987 imposing a definitive anti-dumping duty on imports of urea originating in Libya and Saudi Arabia and accepting undertakings given in connection with imports of urea originating in Czechoslovakia, the German Democratic Republic, Kuwait, the USSR, Trinidad and Tobago and Yugoslavia and terminating these investigations

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RÈGLEMENT (CEE) No 3339/87 DU CONSEIL

du 4 novembre 1987

instituant un droit antidumping définitif sur les importations d'urée originaires de Libye et d'Arabie Saoudite et portant acceptation d'engagements souscrits dans le cadre des importations d'urée originaires de Tchécoslovaquie, de République démocratique allemande, du Koweït, d'Union soviétique, de Trinité et Tobago et de Yougoslavie et portant clôture de ces enquêtes

LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté économique européenne,

vu le règlement (CEE) no 2176/84 du Conseil, du 23 juillet 1984, relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping ou de subventions de la part de pays non membres de la Communauté économique européenne (1), modifié par le règlement (CEE) no 1761/87 (2), et notamment ses articles 10 et 12,

vu la proposition de la Commission, présentée après consultations au sein du comité consultatif institué par ledit règlement,

considérant que ce qui suit:

A. MESURES PROVISOIRES

(1) Par le règlement (CEE) no 1289/87 (3), la Commission a institué un droit antidumping provisoire sur les importations d'urée originaires de Tchécoslovaquie, de la République démocratique allemande, du Koweït, de Libye, d'Arabie Saoudite, d'Union soviétique, de Trinité et Tobago et de Yougoslavie. Ce droit a été prorogé pour une période n'excédant pas deux mois par le règlement (CEE) no 2691/87 (4).

B. SUITE DE LA PROCÉDURE

(2) Après l'institution du droit antidumping provisoire, les producteurs communautaires, plusieurs exportateurs, importateurs et utilisateurs du produit concerné ont sollicité et obtenu l'occasion d'être entendus par la Commission. Les producteurs de la Communauté, la plupart des exportateurs, certains importateurs et utilisateurs ont également fait connaître par écrit leur point de vue sur le règlement concernant le droit provisoire.

(3) Certains exportateurs et importateurs ont également demandé à être informés de certains faits et des considérations essentielles sur la base desquels la Commission se proposait de recommander des mesures définitives et ont obtenu de l'être.

(4) Outre les enquêtes qui ont abouti à la détermination provisoire, la Commission a effectué d'autres enquêtes sur place auprès des sociétés suivantes:

Producteurs communautaires

- Nitrogen, Eireann, Teoranta (Dublin).

Importateurs

- Ferchimex NV (Anvers), importateur lié à Sojuzpromexport (Union soviétique),

- USC (industrial) Ltd (Londres),

- Cerealtoscana SpA (Altopascio),

- Sadepan Chimica (Viadana),

- SIPA (Paris),

- Unifert France SA (Paris).

C. DUMPING

i) Valeur normale

a) Arabie Saoudite

(5) La valeur normale a été calculée définitivement sur la base des prix pratiqués sur le marché intérieur par SAFCO, qui a vendu l'urée produite par SAMAD pendant la période de référence et a fourni des éléments de preuve suffisants.

(6) Les prix de vente facturés par SAFCO à des clients indépendants ont été retenus à cet effet. Cette approche a été adoptée car il est jugé inapproprié de tenir compte de tout prix de transfert entre sociétés liées ou succursales d'un exportateur lors de l'établissement de la valeur normale au moyen des prix du marché intérieur, ces prix n'étant pas les prix réellement payés ou à payer au cours d'opérations commerciales normales pour le produit similaire. En conséquence, seuls les prix facturés à des acheteurs indépendants ont été utilisés pour la détermination de la valeur normale.

Il ressort des éléments de preuve rassemblés au cours de l'enquête que SAMAD et SAFCO font partie intégrante d'un même groupe de sociétés (SABIC). Le fait qu'elles aient des personnalités juridiques distinctes ne les empêche pas de former une seule entité économique. L'élément à retenir en l'occurrence n'est pas la structure juridique, mais le fait que SAFCO agit comme société de vente du produit visé fabriqué par SAMAD et a des fonctions similaires à celles d'un service de vente interne.

L'exportateur a prétendu que, en raison des différences existant entre les quantités vendues sur le marché intérieur et les quantités vendues à l'exportation vers la Communauté, la valeur normale devrait se fonder sur un échantillon restreint de transactions se rapprochant le plus des quantités vendues à l'exportation.

Le Conseil a admis avec la Commission que cette demande revenait à réclamer des ajustements pour les différences supposées affecter la comparabilité des prix et que ces ajustements ne devraient être effectués que conformément aux critères objectifs fixés à l'article 2 paragraphe 10 du règlement (CEE) no 2176/84. C'est pourquoi la valeur normale a été définitivement déterminée sur la base des prix se rapportant à toutes les opérations effectuées sur le marché intérieur au cours de la période de référence. En ce qui concerne la question des ajustements, voir considérants 18 à 21 ci-dessous.

(7) Étant donné que les ventes effectuées sur le marché intérieur ont porté à la fois sur de l'urée traitée et de l'urée non traitée, la valeur normale a été déterminée séparément pour chacun de ces types.

b) Koweït

(8) Dans la détemination de la valeur normale, il a été tenu compte du fait qu'il n'y avait pas eu de ventes importantes de produits similaires sur le marché intérieur de ce pays. En conséquence, il a été décidé d'établir la valeur normale sur la base de la valeur construite.

La valeur construite a été déterminée par l'addition d'une marge bénéficiaire raisonnable au coût de production. Celui-ci a été calculé sur la base de l'ensemble des coûts, tant fixes que variables, des matières premières et de la fabrication au cours d'opérations commerciales normales dans le pays d'origine, augmentés d'un montant raisonnable pour les frais de vente, les dépenses d'administration et autres frais généraux.

Pour la détermination provisoire de la valeur normale, les coûts de production avaient été majorés d'une marge bénéficiaire de 10 %. L'exportateur a toutefois prétendu que cette marge était trop élevée, étant donné les pertes que cette société et d'autres producteurs d'urée dans le monde avaient subies pendant une longue période. En fait, il a été proposé, pour cette raison, de ne pas ajouter de marge bénéficiaire.

Toutefois, compte tenu du libellé très clair de l'article 2 paragraphe 3 point b) sous ii) du règlement (CEE) no 2176/84, selon lequel la valeur construite est établie par addition du coût de production et d'une marge bénéficiaire raisonnable, la question n'est pas de savoir si une marge bénéficiaire doit être ajoutée ou non, mais de savoir quel est le montant qui constitue une marge bénéficiaire raisonnable. Eu égard aux faits disponibles, il faut considérer qu'il ne serait pas raisonnable d'ajouter un pourcentage inférieur à 2,5 %, ce pourcentage étant le minimum absolu requis dans le secteur concerné afin de permettre à un producteur d'acquérir les fonds nécessaires pour qu'une usine continue à fonctionner dans des conditions techniques modernes.

Le producteur d'urée du Koweït a proposé, comme autre solution, d'établir la valeur normale sur la base des prix à l'exportation vers les pays tiers plutôt que sur la base de la valeur construite. Cette proposition n'a pu être suivie, car elle a été faite à un stade extrêmement avancé de l'enquête et, étant donné la forte dépression des prix sur le marché mondial, il a semblé inopportun d'utiliser les prix à l'exportation vers les pays tiers. En effet, dans une situation de prix à la baisse sur le marché mondial, il est fortement probable que, si un exportateur pratique le dumping sur un marché, il le pratiquera également sur d'autres.

c) Trinité et Tobago

(9) En cherchant à déterminer la valeur normale, on a tenu compte du fait que les ventes du produit similaire sur le marché intérieur de ce pays étaient insignifiantes. En conséquence, il a été décidé d'établir la valeur normale sur la base de la valeur construite.

La valeur construite a été établie par l'addition d'une marge bénéficiaire raisonnable au coût de production. Celui-ci a été calculé sur la base de l'ensemble des coûts, tant fixes que variables, des matières premières et de la fabrication au cours d'opérations commerciales normales dans le pays d'origine, augmentés d'un montant raisonnable pour les frais de vente, les dépenses d'administration et autres frais généraux. Le producteur de Trinité et Tobago a demandé que soient exclus au coût de production les amortissements financiers et la dépréciation des actifs, au motif qu'il avait récemment commencé la production du produit visé et que ces coûts ne devaient donc pas être considérés comme se rapportant à des opérations commerciales normales. Cette demande n'a pas pu être satisfaite parce que ces éléments figurent normalement dans les coûts de production d'une société établie dans un pays à économie de marché et reflètent les dépenses réelles. Il a également été demandé que soient exclus les coûts de financement liés à la construction de l'usine, sinon la Communauté agirait en violation des articles 129 et 185 de la troisième convention ACP-CEE. Une telle requête ne peut cependant être satisfaite, car ces articles n'entrent pas en ligne de compte pour l'établissement de la valeur normale. L'état de développement du pays exportateur ne peut être pris en compte que lorsqu'on examine quelles sont les mesures qui sont les plus appropriées dans l'intérêt de la Communauté, mais non lorsqu'on détermine un dumping, opération qui requiert l'application de critères objectifs. Cette interprétation est conforme à l'article 13 de l'accord relatif à la mise en oeuvre de l'article VI de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT).

La société a également demandé que soient exclus de la détermination définitive de la valeur normale les coûts relatifs à la construction d'une jetée utilisée pour l'expédition de produits, notamment de l'urée. Étant donné qu'au cours de l'enquête sur place il s'est avéré que ces montants avaient effectivement été imputés à l'usine d'urée au cours de la période de référence et que par la suite aucun élément déterminant de preuve du contraire n'a été reçu, il n'a pas pu être accédé à cette demande.

En ce qui concerne la marge bénéficiaire, il a été allégué qu'il n'était pas raisonnable de s'en tenir au chiffre de 7 % utilisé pour la détermination préliminaire, en raison principalement du fait que les prix du marché au cours de la période de référence étaient à la baisse et que les producteurs d'urée dans le monde entier étaient incapables de faire des bénéfices. Pour les motifs exposés au considérant 8, il est estimé raisonnable d'ajouter une marge bénéficiaire de 2,5 % aux coûts de production du producteur de Trinité et Tobago.

d) Yougoslavie

(10) Par suite du manque de coopération de la part du producteur yougoslave au stade initial de l'enquête, la détermination provisoire de la valeur normale s'est faite sur la base des données disponibles, c'est-à-dire sur le prix payable sur le marché intérieur, tel qu'indiqué dans la plainte. Bien qu'à un stade ultérieur de l'enquête la société concernée ait offert de coopérer avec la Commission, elle n'a présenté aucun élément de preuve concernant la valeur normale. Par conséquent, le Conseil confirme la détermination provisoire faite par la Commission.

e) Lybie

(11) Étant donné que le producteur concerné n'a pas formulé d'observations après la détermination provisoire de la Commission, et faute d'une coopération suffisante et de meilleurs éléments d'information, la valeur normale est définitivement déterminée, conformément à l'article 7 paragraphe 7 point b) du règlement (CEE) no 2176/84, sur la base des faits connus, c'est-à-dire sur le coût de production indiqué dans la plainte. En ce qui concerne le taux de la marge bénéficiaire à ajouter au coût de production, il est estimé opportun d'utiliser le même chiffre que pour les producteurs du Koweït et de Trinité et Tobago (voir considérant 8).

f) Tchécoslovaquie, République démocratique allemande et Union soviétique

(12) Afin de parvenir à la détermination provisoire de la valeur normale, la Commission a tenu compte du fait que la Tchécoslovaquie, la République démocratique allemande et l'Union soviétique n'ont pas d'économie de marché. Pour établir si les importations venant de ces pays faisaient l'objet d'un dumping, les déterminations se sont donc fondées sur la valeur normale dans un pays à économie de marché. À cet égard, les plaignants avaient proposé le marché autrichien.

(13) Pour les raisons exposées au considérant 16 du règlement (CEE) no 1289/87, la Commission a toutefois estimé que, aux fins de la détermination provisoire, l'Arabie Saoudite constituait dans ce cas un choix approprié et non déraisonnable comme pays analogue.

(14) Les producteurs de Tchécoslovaquie et d'Union soviétique n'ont pas contesté ce choix après l'institution du droit antidumping provisoire.

Le producteur de la République démocratique allemande a demandé que la valeur normale soit déterminée sur la base de la structure de ses propres coûts de production plutôt que sur la valeur normale d'un pays tiers à économie de marché. Cette demande n'a toutefois pas pu être satisfaite car cette méthode ne rentre pas dans l'une des possibilités prévues à l'article 2 paragraphe 5 du règlement (CEE) no 2176/84.

En conséquence, le Conseil confirme la détermination provisoire de la Commission.

ii) Prix à l'exportation

(15) Les prix à l'exportation ont été établis, d'une manière générale, sur la base des prix réellement payés ou à payer pour les produits vendus à l'exportation vers la Communauté.

(1) JO no L 201 du 30. 7. 1984, p. 1.

(2) JO no L 167 du 26. 6. 1987, p. 9.

(3) JO no L 121 du 9. 5. 1987, p. 11.

(4) JO no L 254 du 5. 9. 1987, p. 20.

(16) En ce qui concerne les exportations vers la Communauté du produit originaire d'Union soviétique, il s'est avéré qu'elles ont eu lieu en majorité par l'intermédiaire d'une filiale établie dans la Communauté. Bien qu'en pareil cas le prix à l'exportation soit normalement construit, conformément à l'article 2 paragraphe 8 point b) du règlement (CEE) no 2176/84, la Commission a estimé suffisant, pour la détermination préliminaire, de calculer le prix à l'exportation afférent à ces transactions sur la base de la valeur facturée par l'exportateur à l'importateur. En effet, il y avait lieu de croire que les prix facturés ne s'écartaient pas sensiblement du niveau que l'on aurait atteint en construisant le prix à l'exportation.

Après l'institution des droits antidumping provisoires, une enquête sur place a eu lieu dans les locaux de l'importateur lié à l'exportateur soviétique afin de vérifier avant tout les prix auxquels le produit importé était revendu pour la première fois par cet importateur à des acheteurs indépendants. Sur la base de ces données, les prix à l'exportation ont finalement été reconstruits conformément à l'article 2 paragraphe 8 point b) du règlement (CEE) no 2176/84.

Quant au reste des exportations effectuées par l'exportateur soviétique au cours de la période de référence, c'est-à-dire les exportations effectuées à des importateurs non liés, les prix à l'exportation ont finalement été déterminés sur la base des prix réellement payés.

iii) Comparaison

(17) En comparant la valeur normale avec les prix à l'exportation, on a tenu compte, le cas échéant, des différences affectant la comparabilité des prix selon les modalités fixées à l'article 2 paragraphe 10 du règlement (CEE) no 2176/84.

a) Différences de quantités

(18) Le producteur/exportateur d'Arabie Saoudite a demandé que des ajustements soient effectués conformément à l'article 2 paragraphe 10 point b) sous i) du règlement (CEE) no 2176/84 afin qu'il soit tenu compte des différences existant entre les quantités vendues sur le marché intérieur et les quantités vendues à l'exportation vers la Communauté. À cette fin, il a été proposé que le rabais de quantité, systématiquement accordé sur le marché intérieur pour des ventes de 5 000 tonnes ou plus, soit appliqué à toutes les ventes nationales pour que les quantités correspondantes soient rendues comparables aux quantités exportées.

Cette demande n'a pas été retenue car il n'a été fourni aucun élément convaincant prouvant qu'il était satisfait à tous les critères énoncés à l'article 2 paragraphe 10 point b) sous i) ou ii) du règlement (CEE) no 2176/84. Le Conseil souligne qu'il avait dejà été tenu compte des différences de quantité lorsqu'on a déterminé la valeur normale sur la base de la moyenne pondérée de tous les prix réellement payés et lorsqu'on a procédé à des ajustements pour tenir compte des différences dans les conditions de vente.

b) Différences dans les conditions de vente

(19) En ce qui concerne les différences dans les conditions de vente, les ajustements ont été limités aux différences qui avaient une relation directe avec les ventes considérées, telles que les conditions de crédit, les charges bancaires, le transport, l'assurance, les commissions, l'entreposage, le salaire des vendeurs, l'emballage et la manutention.

(20) Les demandes d'ajustements présentées pour d'autres différences telles que les différences dans l'assistance technique et la publicité n'ont pas été retenues parce qu'il n'a pas été présenté d'élément de preuve satisfaisant montrant que les différences dans les coûts avaient eu une relation directe avec les ventes considérées.

Le producteur/exportateur d'Arabie Saoudite a également demandé un ajustement pour les différences de stade commercial en alléguant que toutes les ventes effectuées sur le marché intérieur étaient destinées aux utilisateurs finals, c'est-à-dire à des fermiers individuels ou à des sociétés agricoles, sauf les livraisons faites à un client, grand utilisateur industriel d'urée, qui avait droit, en principe, à un rabais supplémentaire, alors que plus de 70 % des expéditions vers la communauté étaient prétendument destinées pour un usage industriel à des clients transformant l'urée en d'autres types d'engrais.

Cette demande n'a pas été retenue car il a été estimé qu'il n'a pas été prouvé de manière satisfaisante qu'il y avait une différence de stade commercial, étant donné que la plus grande partie des ventes, tant sur le marché intérieur qu'à l'exportation, étaient faites à des utilisateurs finals. De plus, le producteur/exportateur a admis que le client concerné en Arabie saoudite n'avait pas bénéficié de ce rabais au cours de la période de référence.

(21) La comparaison des prix à l'exportation avec la valeur normale a été effectuée sur la base suivante:

- Arabie Saoudite: départ entrepôt,

- Koweït et Trinité et Tobago: fob,

- Yougoslavie, Libye, Tchécoslovaquie, République démocratique allemande et Union soviétique: départ usine.

iv) Marges de dumping

(22) La marge de dumping calculée pour chaque exportateur est égale à la différence entre la valeur normale établie et le prix de chaque opération d'exportation vers la Communauté. L'examen des faits a montré l'existence de pratiques de dumping de la part des producteurs/exportateurs concernés par la présente procédure.

(23) Ces marges varient en fonction de l'exportateur, la marge moyenne pondérée pour chacun des exportateurs concernés étant la suivante:

1.2 // // % // a) Arabie Saoudite // // SAMAD/SAFCO // 55 // b) Koweït // // PIC // 36 // c) Trinité et Tobago // // NEC // 37 // d) Yougoslavie // // INA // 78 // e) Libye // // NAPETCO // 58 // f) Tchécoslovaquie // // Petrimex // 36 // g) République démocratique allemande // // Chemie-Export-Import // 51 // // % // h) Union soviétique // // Sojuzpromexport // 60

D. PRÉJUDICE

(24) En ce qui concerne le préjudice causé par les importations ayant fait l'objet d'un dumping, il ressort des éléments de preuve disponibles que les importations d'urée de Tchécoslovaquie, de République démocratique allemande, du Koweït, de Libye, d'Arabie Saoudite, d'Union soviétique, de Trinité et Tobago et de Yougoslavie vers la Communauté sont passées de 95 188 tonnes en 1984 à 236 245 tonnes en 1985, soit une augmentation de 148 %. Au cours des neuf premiers mois de 1986, ces importations se sont élevées à 722 455 tonnes. Sur toute l'année 1986, elles ont atteint 1 034 051 tonnes, représentant une augmentation de 338 % par rapport à 1985.

Les importations (en tonnes) à partir de chacun des pays concernés par la présente procédure se sont accrues comme suit entre 1984 et 1986:

1.2.3.4.5 // // // // // // // 1984 // 1985 // 1986 (9 mois) // 1986 (année entière) // // // // // // Tchécoslovaquie // 34 257 // 33 621 // 30 951 // 42 631 // République démocratique allemande // 33 771 // 26 180 // 72 274 // 89 739 // Koweït // - // 11 212 // 46 709 // 46 710 // Libye // 2 188 // 15 252 // 182 369 // 284 303 // Arabie Saoudite // - // 20 000 // 110 475 // 110 475 // Union soviétique (1) // 9 223 // 77 650 // 154 834 // 270 849 // Trinité et Tobago // - // 30 209 // 94 871 // 147 936 // Yougoslavie // 15 749 // 22 121 // 29 972 // 41 408 // // // // //

(1) Selon les chiffres présentés par l'exportateur d'Union soviétique, les exportations avaient même été plus élevées, notamment en 1985. Aucun élément de preuve déterminant n'a cependant été reçu.

(25) La part de marché détenue par ces pays dans la Communauté est ainsi passée de 2,45 % en 1984 à 5,85 % en 1985 et à 20,28 % au cours des neuf premiers mois de 1986. Si la production captive d'urée des producteurs communautaires est déduite de la consommation communautaire totale, la part de marché représentée par les importations faisant l'objet d'un dumping est passée de 3,48 % en 1984 à 8,20 % en 1985 et à 26,29 % au cours des neuf premiers mois de 1986. Si cette évolution est rapportée aux seuls usages agricoles de l'urée, à supposer que 90 % de ces importations soient vendues dans le secteur agricole, la part de marché y est passée de 4,06 % en 1984 à 9,37 % en 1985 et à 29 % au cours des neuf premiers mois de 1986.

(26) Plusieurs parties ont soutenu que, en évaluant l'impact, sur la production communautaire, des importations ayant fait l'objet d'un dumping, il fallait tenir compte du fait que les producteurs communautaires avaient eux-mêmes acheté une partie des produits en cause.

À cet égard, il a été établi que, pendant la période de référence, les producteurs communautaires d'urée ont importé, directement ou indirectement, environ 108 000 tonnes d'urée originaire de la République démocratique allemande, de Libye, de Trinité et Tobago et d'Union soviétique.

a) Pendant la période de référence, les producteurs français ont acheté environ 68 000 tonnes de produits faisant l'objet d'un dumping. Si ces opérations ont eu lieu, c'est essentiellement parce qu'un des producteurs avait fermé son usine principale pendant neuf mois en 1985 pour en améliorer l'efficacité et qu'il disposait en conséquence d'un volume insuffisant pour approvisionner sa clientèle en France. Au dire des producteurs français, ceux-ci voulaient également empêcher que certains de leurs clients ne se tournent vers d'autres sources d'approvisionnement. D'après les renseignements disponibles, les prix de revente du produit importé étaient semblables aux prix facturés par les producteurs pour leur propre produit.

b) Les producteurs italiens ont acheté la totalité de l'urée originaire d'Union soviétique qui est entrée en Italie au cours de la période de référence, soit 16 881 tonnes.

Sur ce total, quelque 4 500 tonnes ont été revendues à des clients réguliers, à des prix sensiblement inférieurs aux prix de vente pratiqués pour le produit fabriqué en Italie. Le solde a été revendu à des prix semblables à ceux facturés pour le produit fabriqué et vendu en Italie.

c) En 1986, le producteur portugais d'urée a acheté 17 182 tonnes du produit concerné originaire de Lybie et quelques 6 000 tonnes d'urée originaire de la République démocratique allemande. Ces opérations s'expliquent par une grave panne technique survenue à l'usine de ce producteur.

Dans ces conditions, la Commission, dans sa détermination préliminaire, a décidé que les producteurs français et italiens qui importaient et revendaient le produit faisant l'objet d'un dumping ne devaient pas être exclus de l'industrie communautaire affectée par les importations en cause. Le Conseil remarque que la quantité importée et revendue par ces producteurs représentait une part minime (0,61 % en 1985 et 5,34 % au cours des neuf premiers mois de 1986) des ventes totales d'urée agricole effectuées par les producteurs plaignants dans la Communauté et qu'une faible part seulement, soit respectivement 0,29 % et 2,06 % et 2,06 % de la consommation totale de la Communauté, a été revendue à des prix particulièrement bas. En ce qui concerne le préjudice que les producteurs communautaires auraient subi du fait de ces ventes à bas prix, le Conseil a estimé qu'il leur était directement imputable. Étant donné l'importance limitée des opérations en question et le fait que la plus grande partie des importations effectuées par les producteurs communautaires a été revendus à des prix correspondant aux propres prix des producteurs, le Conseil a considéré que les producteurs en question ne devraient pas être exclus de la production de la Communauté au sens de l'article 4 paragraphe 5 du règlement (CEE) no 2176/84. Toutefois, étant donné que la propre production du producteur portugais avait été insignifiante en 1986, le Conseil a jugé opportun d'exclure cette société de l'évaluation du préjudice.

Plusieurs des parties intéressées par le résultat de la présente procédure ont soutenu qu'il devrait être tenu compte des importations effectuées à des prix de dumping par les producteurs communautaires après la fin de la période de référence. Cet argument doit être rejeté car il serait contraire à l'article 7 paragraphe 1 point c) du règlement (CEE) no 2176/84, aux termes duquel l'enquête sur le dumping couvre la période antérieure à l'ouverture de la procédure, de prendre en considération des importations effectuées à des prix de dumping après la fin de la période de référence.

(27) Il a été établi que, de 1984 à 1986, en supposant que la tendance des neuf premiers mois de 1986 se soit poursuivie au cours des trois derniers mois, la consommation d'urée dans la communauté est passée de 2 737 503 tonnes à 3 734 977 tonnes, soit une augmentation d'environ 36 %, sur le marché libre, et de 2 108 503 tonnes à 3 054 009 tonnes, soit une augmentation d'environ 44 %, pour les utilisations agricoles.

L'examen de l'impact, sur le marché communautaire, des importations faisant l'objet d'un dumping a fait ressortir que la production totale d'urée était tombée d'environ 5 567 000 tonnes en 1984 à 4 870 000 tonnes en 1985 et à 4 313 000 tonnes en 1986 (à supposer que le taux de production des neuf premiers mois de 1986 soit resté constant pendant les trois derniers mois), ce qui représente une réduction de 12,5 % en 1985 et de 11,4 % en 1986. La production d'urée disponible sur le marché libre (c'est-à-dire la production totale moins la production captive) est tombée d'un volume estimé à 4 415 321 tonnes en 1984 à 3 710 000 tonnes en 1985 et à 3 228 000 tonnes en 1986, à supposer que le taux de production des neuf premiers mois de 1986 soit resté constant au cours des trois derniers mois de l'année. Cette évolution représenterait, par comparaison avec les années antérieures, une baisse de 16 % en 1985 et de 13 % en 1986.

(28) En ce qui concerne l'utilisation des capacités de l'industrie communautaire, elle est tombée de 85 % environ en 1984 à 77 % environ en 1985, puis à 66 % environ en 1986. On ne disposait pas de données séparées concernant la part de l'utilisation des capacités qui revient à la production d'urée pour le seul marché libre, car les chiffres relatifs à la capacité de production n'ont pas été différenciés en fonction des utilisations futures du produit.

(29) Les ventes totales, dans la Communauté, d'urée produite dans celle-ci se sont accrues, passant d'environ 3 587 000 tonnes en 1984 à environ 3 615 000 tonnes en 1985. En 1986, elles sont tombées à environ 3 461 000 tonnes (à supposer que la tendance des neuf premiers mois de 1986 se soit poursuivie pendant les trois derniers mois), soit à un niveau inférieur de 3,5 % à celui de 1984. Les ventes des producteurs communautaires d'urée destinée au marché libre de la Communauté sont tombées de 2 435 771 tonnes en 1984 à 1 782 315 tonnes durant les neuf premiers mois de 1986. À supposer que la tendance des ventes au cours des neuf premiers mois ait persisté durant les trois derniers mois de l'année, les ventes auraient porté sur 2 376 420 tonnes en 1986, ce qui correspond à une baisse de 2,44 % par rapport à 1984. Quant aux ventes d'urée agricole effectuées par ces sociétés, elles sont restées stables durant cette même période (1984-1986).

Les ventes d'urée réalisées par les producteurs communautaires en dehors de la Communauté ont diminué, passant d'environ 1 901 000 tonnes en 1984 à 1 492 000 tonnes environ en 1985 et à 728 000 tonnes environ en 1986 (à supposer que la tendance des neuf premiers mois se soit poursuivie durant les trois derniers mois).

(30) La part des producteurs communautaires sur le marché non captif de l'urée dans la Communauté était de 89 % en 1984. En 1985, elle est tombée à 85,27 % et a poursuivi sa baisse pendant les neuf premiers mois de 1986, pour atteindre environ 65 %. La part de ces producteurs sur le marché de l'urée agricole est tombée d'environ 87 % en 1984 à environ 83 % en 1985 et à environ 61 % pour les neuf premiers mois de 1986.

En France et en Italie, principaux marchés de l'urée agricole avant l'adhésion de l'Espagne et du Portugal à la Communauté, la part des producteurs communautaires sur le marché de l'urée agricole est tombée respectivement d'environ 95 % et environ 88 % en 1984 à environ 74 % et environ 71 % au cours des neuf premiers mois de 1986.

Au Royaume-Uni, la part du marché librement accessible de l'urée, détenue par le producteur national, est tombée d'environ 44 % en 1984 à environ 39 % au cours des neuf premiers mois de 1986. En Irlande, la part de marché détenue par le producteur national est tombée d'environ 78 % en 1984 à environ 54 % au cours des neuf premiers mois de 1986. Cette évolution reflète le fait que les producteurs communautaires n'ont pas pu profiter de l'augmentation de la consommation, qui a été entièrement absorbée par les importations faites à des prix de dumping.

(31) En ce qui concerne les prix et les bénéfices, il a été jugé opportun d'examiner les points suivants:

i) l'évolution des prix de vente auxquels les producteurs plaignants ont vendu l'urée dans la Communauté entre le 1er juillet 1985 et le 30 septembre 1986;

ii) le rapport entre ces prix, les coûts de production supportés par les producteurs communautaires d'urée durant cette période et les bénéfices résultant de leurs ventes d'urée dans la Communauté;

iii) le rapport entre les prix facturés par les producteurs plaignants et les prix auxquels les produits faisant l'objet d'un dumping ont été vendus dans la Communauté.

Au vu du fait que les conclusions relatives aux marchés italien et français exposées aux considérants 31 à 32 du règlement (CEE) no 1289/87 n'ont pas été contestées de manière significative après l'institution du droit antidumping provisoire, le Conseil confirme ces conclusions.

(32) Après l'institution du droit provisoire, la Commission a continué d'enquêter sur la situation des producteurs communautaires au Royaume-Uni et en Irlande, représentant respectivement 6,4 % et 4 % du marché de l'urée agricole dans la Communauté.

En ce qui concerne le producteur national du Royaume-Uni, il a été constaté que les coûts de production (par unité) étaient en 1985 supérieurs de 15 % à ceux de 1984 alors que le prix de vente net moyen avait augmenté d'environ 13 % au cours de la même période. Il a également été constaté qu'au cours des neuf premiers mois de 1986 les coûts de production par unité sont restés relativement stables par rapport aux neuf premiers mois de 1985, alors que le prix net moyen par unité après rabais était tombé de 17 %. Il a par ailleurs été établi que les prix de vente du producteur en question avant rabais sur le marché intérieur étaient tombés de 14,9 % entre le 1er juillet 1985 et le 30 juin 1986, entraînant une diminution importante de la rentabilité. Il s'est avéré que ce producteur avait commencé à subir des pertes en 1985 et que celles-ci avaient considérablement augmenté au cours des neuf premiers mois de 1986. En outre, une marge moyenne pondérée de sous-cotation des prix de 4,8 % a été constatée en ce qui concerne les ventes au cours de la période de référence. En Irlande, les prix de vente du seul producteur national sont tombés de 14,3 % entre janvier et juin 1986, période au cours de laquelle les importations faisant l'objet d'un dumping ont atteint pour la première fois une part de marché importante, et les ventes du producteur irlandais ont diminué de façon correspondante. Des marges moyennes pondérées de sous-cotation des prix variant entre 18 % et 23 % ont également été observées sur ce marché.

Pour ce producteur, les coûts de production ont augmenté de 41,6 % entre 1984 et 1985 alors que les prix de vente nets sur le marché intérieur augmentaient de 7,5 %. Au cours des neuf premiers mois de 1986, le coût de production par unité avait diminué de 20,4 % par rapport à la même période en 1985 alors que le prix de vente unitaire moyen après rabais était tombé de 26,9 %.

En ce qui concerne la rentabilité de ce producteur, il a été établi que les bénéfices étaient tombés d'environ 17 % en 1985 et d'environ 7 % au cours des neuf premiers mois de 1986.

(33) En ce qui concerne les prix et la rentabilité des producteurs en Espagne, le Conseil confirme la position prise par la Commission au considérant 33 du règlement (CEE) no 1289/87, qui n'a pas été contestée.

(34) En déterminant l'incidence des importations faisant l'objet d'un dumping sur la production de la Communauté, on a pris en considération l'effet de toutes les importations en cause effectuées à partir de tous les pays concernés. Pour établir si le cumul s'imposait, la Commission a examiné si les importations en cause avaient contribué au préjudice important subi par la Communauté. En formulant ses conclusions, elle a pris en considération la comparabilité des produits importés en termes de caractéristiques chimiques et physiques, la mesure dans laquelle chacun des produits importés a concurrencé, dans la Communauté, le produit similaire de l'industrie communautaire, le volume des importations et l'accroissement du volume depuis 1984, des importations à partir de chacun des pays exportateurs.

En ce qui concerne la comparabilité des produits importés, qui se présentaient principalement sous forme perlée, il a été constaté que, dans le secteur agricole aussi bien que dans le secteur technique, les produits étaient utilisés de manière interchangeable, quel que soit le pays d'origine, les caractéristiques chimiques et physiques des produits concernés étant très similaires. Il a également été constaté que le produit originaire de chacun des pays exportateurs concernés par la présente procédure concurrençait le produit communautaire.

Pour ce qui est des importations du produit, originaire de Trinité et Tobago, il a été soutenu qu'elles n'entraient pas en concurrence avec le produit originaire des autres pays tiers concernés par la présente procédure, la matière produite et exportée vers la Communauté étant du type granulé employé pour les mélanges d'engrais composés, tandis que le type originaire des autres pays concernés par la présente procédure était vendu dans la Communauté sous forme perlée. Par ailleurs, il a été allégué que l'urée granulée avait généralement été vendue à des prix plus élevés que ceux pratiqués pour le produit perlé.

L'enquête a cependant révélé que l'urée granulée et l'urée perlée étaient des produits similaires. En premier lieu, elles sont chimiquement identiques. En second lieu, les différences physiques telles que la granulométrie, la résistance à l'écrasement ou la résistance à l'abrasion, n'ont pas d'incidence notable sur l'interchangeabilité des deux types. Il n'a pas non plus été prouvé que l'urée granulée ait bénéficié d'une prime pendant la période de référence. En ce qui concerne les prix à l'importation du produit originaire de Trinité et Tobago, il a été établi que le prix moyen facturé par l'exportateur durant la période de référence n'était pas plus élevé que celui pratiqué durant la même période par la plupart des autres exportateurs concernés par la présente procédure.

En ce qui concerne le volume des importations faisant l'objet d'un dumping, et notamment leur augmentation entre 1984 et 1986, l'évolution a été la suivante:

- Tchécoslovaquie: + 24 %,

- République démocratique

allemande: + 165 %,

- Libye: + 12 893 %,

- Union soviétique: + 2 836 %,

- Yougoslavie: + 162 %.

En ce qui concerne les nouveaux venus sur le marché, c'est-à-dire le Koweït, l'Arabie Saoudite et Trinité et Tobago, qui ont commencé à exporter vers la Communauté en 1985, leurs importations ont augmenté entre 1985 et 1986 comme suit:

- Koweït: + 316 %,

- Arabie Saoudite: + 452 %,

- Trinité et Tobago: + 389 %.

Sur la base de cette analyse, la Commission a conclu que, pour apprécier l'ampleur du préjudice subi par l'industrie communautaire, il convenait de considérer l'effet cumulé des importations vendues à des prix de dumping à partir de tous les pays exportateurs en cause.

Le Conseil confirme ces résultats et ces conclusions. (35) Dans ces conditions, le Conseil constate que la production de la Communauté a subi un préjudice important en raison des importations effectuées à des prix de dumping.

(36) Il a été examiné si le préjudice a été causé par d'autres facteurs, tels que les excédents mondiaux d'urée qui, à en croire certains exportateurs et importateur, auraient entraîné une dépression générale des prix et une perte des marchés d'exportation pour les producteurs communautaires. En outre, certaines parties ont laissé entendre que, s'il était établi que les producteurs communautaires rencontraient des difficultés, celles-ci seraient dues à la vive concurrence que se livraient ces mêmes producteurs communautaires et non aux importations à partir de pays tiers.

Les éléments disponibles font ressortir l'existence, depuis 1984, d'une importante capacité de production inutilisée à l'échelle mondiale et d'une production excédentaire par rapport à la consommation d'urée et d'autres engrais qui, même en l'absence d'importations faites à des prix de dumping, étaient susceptibles d'entraîner une chute des prix dans la Communauté, d'autant plus que le marché des engrais est un marché très transparent, où l'information est en général accessible sans difficulté aux acheteurs et aux vendeurs.

Il a également été constaté que, en raison d'une augmentation de la capacité de production dans les pays tiers, les producteurs communautaires ont perdu une partie de leurs marchés d'exportation. En conséquence, l'impact des importations faisant l'objet d'un dumping a été encore davantage ressenti par l'industrie communautaire. En outre, il a été tenu compte du fait que seules les importations faisant l'objet d'un dumping ont absorbé entièrement l'augmentation de la consommation qui a eu lieu dans la Communauté au cours des trois dernières années (voir considérant 27).

En ce qui concerne les ventes intracommunautaires, il a été constaté que d'importantes quantités d'urée servant à l'agriculture ont été vendues sur le marché français par des producteurs communautaires établis dans d'autres États membres. L'urée étant un produit très sensible quant au prix, ces producteurs avaient dû également aligner leurs prix de vente finals sur le prix des importations faisant l'objet d'un dumping en accordant rétroactivement des rabais. Les ventes effectuées par les autres producteurs communautaires en Italie ont été négligeables.

Quant aux importations à partir de pays tiers non concernés par la présente procédure qui avaient eu lieu avant le début de la présente procédure, la Commission a examiné les parts détenues par chacun de ces pays exportateurs sur le marché communautaire en se fondant sur les éléments de preuve fournis par les plaignants. Il a été établi que ces pays ne détenaient pas de parts de marché suffisamment importantes pour contribuer de manière significative au préjudice allégué; c'est pourquoi ils n'ont pas été inclus dans la procédure initiale.

Il a également été soutenu qu'il devrait être tenu compte des importations effectuées à partir de pays tiers non concernés par la présente procédure, mais qui avaient sensiblement augmenté après l'ouverture de cette dernière. À cet égard, la Commission a reçu, en septembre 1987, une demande du plaignant tendant à faire inclure dans la présente procédure antidumping les importations faites à partir de l'Autriche, de la Hongrie, de la Malaysia, de la Roumanie, des États-Unis d'Amérique et du Venezuela. À cette fin, la Commission a publié un avis d'extension de la procédure (1).

(37) En ce qui concerne les prix à l'exportation facturés pour les livraisons vers la Communauté, plusieurs exportateurs ont fait valoir qu'ils n'avaient pas eu d'autre choix que de vendre aux bas prix constatés par la Commission au cours de l'enquête, en raison de la dépression des prix de ce produit à l'échelle mondiale.

À cet égard, la Commission a obtenu des informations contradictoires indiquant que les prix pratiqués en dehors de la Communauté étaient parfois plus élevés et parfois plus bas que ceux pratiqués à l'intérieur de la Communauté. Quoi qu'il en soit, le Conseil confirme le fait que, bien que les prix d'un produit particulier soient à la baisse hors de la Communauté, cela ne justifie en aucune façon que les exportateurs vendent leurs produits à des prix de dumping dans la Communauté, ni que l'on ne protège pas l'industrie communautaire si et lorsqu'il a été établi qu'elle subissait un préjudice important du fait d'importations effectuées à des prix de dumping.

(38) Le Conseil a tenu compte des faits mentionnés ci-dessus et a estimé que l'accroissement substantiel des importations faites à des prix de dumping et les prix particulièrement bas auxquels elles étaient offertes aux acheteurs dans la Communauté ont été les principaux facteurs qui ont obligé les producteurs communautaires à abaisser leurs prix à des niveaux insuffisants pour assurer la couverture de leurs coûts. En particulier, dans le cas d'un produit de base tel que l'urée, où le prix d'achat paraît déterminant et où la loyauté entre fournisseur et client semble jouer un rôle minime, voire inexistant, les offres à bas prix faites de l'extérieur auront forcément de sérieux effets défavorables sur la production intérieure, d'autant plus que dans ce cas les producteurs sont privés du bénéfice d'une consommation accrue. Dès lors, le Conseil a été amené à conclure que, malgré l'existence d'une surcapacité et d'excédents, les effets des importations d'urée faites à des prix de dumping à partir des pays concernés par la présente procédure, pris insolément, doivent être considérés comme causant un préjudice important aux producteurs communautaires concernés.

(1) JO no C 271 du 9. 10. 1987, p. 4.

E. INTÉRÊT DE LA COMMUNAUTÉ

(39) Les associations d'agriculteurs ont fait valoir qu'il n'était pas dans l'intérêt de la Communauté d'instaurer des mesures qui auraient pour effet d'augmenter le prix d'achat de l'urée à payer par les agriculteurs. Toutefois, elles n'ont fourni aucune preuve de ce que les mesures de défense auraient une incidence significative sur les coûts de production des agriculteurs ou que ceux-ci seraient empêchés de répercuter ces majorations sur les consommateurs.

Les utilisateurs espagnols du type technique d'urée (employé pour la production de colles et de résines) ont prétendu que l'urée technique devrait être exclue de toutes mesures définitives parce que des mesures de défense auraient une incidence grave sur la production des colles et des résines en Espagne ainsi que sur les utilisateurs des produits dérivés, tels que les fabricants de panneaux de particules. Toutefois, la présente procédure concerne les importations faites dans la Communauté dans son ensemble et pas seulement en Espagne. Aucune observation semblable n'avait été faite par les utilisateurs d'urée technique dans d'autres États membres. De plus, l'exclusion des importations d'un type particulier du produit en cause dans un État membre déterminé serait très difficile, pour ne pas dire impossible, pour des raisons de contrôle douanier.

En outre, il n'a pas été prouvé que les inconvénients susceptibles de résulter pour les utilisateurs d'urée (agricole et technique) de l'adoption de mesures de défense seraient supérieurs aux avantages que la Communauté retirerait de l'institution de mesures de défense destinées à créer des conditions de marché permettant aux producteurs communautaires d'urée de produire et de vendre le produit concerné dans la Communauté sans subir de pertes majeures en raison d'importantes importations effectuées à des prix de dumping.

(40) On a également soutenu que les mesures de défense dissuaderaient les producteurs communautaires d'urée de réduire leurs prix de vente du produit concerné pour tenir compte de la baisse substantielle du prix du gaz, principale matière première dans la production d'urée, intervenue depuis le début de 1984. Il a été toutefois établi que, pendant la période de référence, les prix des producteurs communautaires ont généralement baissé dans une mesure bien supérieure à la réduction de leurs coûts de production.

Un exportateur a fait valoir que, dans le cas présent, des mesures antidumping pourraient avoir un effet négatif car, par suite de la réduction escomptée des importations dans la Communauté, la concurrence augmenterait sur les marchés tiers et entraînerait une perte supplémentaire des exportations pour les producteurs communautaires. Le Conseil a estimé qu'il était difficile, voire impossible, de prédire si les mesures de défense auraient ou non des effets négatifs sur les activités d'exportation des producteurs communautaires.

(41) D'autre part, il a été soutenu qu'il n'était pas dans l'intérêt de la Communauté d'instaurer des mesures de défense contre certains pays, tels que Trinité et Tobago, la Yougoslavie, le Koweït et l'Arabie Saoudite, eu égard aux caractéristiques particulières des rapports qui unissent la Communauté et ces pays tiers.

Malgré tout l'intérêt que le maintien de bonnes relations avec ces pays présente pour la Communauté, le Conseil a néanmoins estimé que l'existence de relations commerciales normales implique que les ventes ne se fassent pas à des prix de dumping. Par ailleurs, la Communauté agirait de façon discriminatoire si elle prenait des mesures de défense contre des exportateurs de certains pays qui ont vendu dans la Communauté à des prix de dumping, mais non contre les exportateurs d'autres pays suivant des pratiques analogues.

(42) Au vu des difficultés particulièrement graves auxquelles est confrontée l'industrie communautaire, la Commission a conclu que les intérêts de la Communauté commandent de prendre des mesures définitives.

Le Conseil confirme cette conclusion.

F. ENGAGEMENTS

(43) Les producteurs/exportateurs suivants ont souscrit des engagements conformément à l'article 10 du règlement (CEE) no 2176/84:

- Tchécoslovaquie: Petrimex Foreign Trade Company Ltd (Bratislava),

- République démocratique allemande:

Chemie-Export-Import (Berlin),

- Trinité et Tobago:

National Energy Corporation of Trinidad and Tobago Ltd (Port of Spain),

- Koweït:

Petrochemical Industry Company (Koweït),

- Union soviétique:

Sojuzpromexport (Moscou),

- Yougoslavie:

INA-Petrokemija (Kutina) et INA-Commerce (Zagreb).

Ces engagements ont été jugés acceptables par la Commission, qui a estimé qu'ils soulageraient de manière adéquate l'industrie communautaire du fait qu'ils réduiront à une part raisonnable de la consommation d'urée les futures importations de ce produit à partir de ces pays. De plus, dans la mesure où elle concerne les pays en développement, cette solution est conforme à l'article 13 du code antidumping du GATT.

G. DROIT DÉFINITIF

(44) En ce qui concerne le produit visé originaire de Libye et d'Arabie Saoudite, les mesures devraient prendre la forme d'un droit antidumping définitif.

Eu égard à l'ampleur du préjudice causé, le taux du droit doit être inférieur aux marges de dumping définitivement établies, mais suffisant pour supprimer le préjudice causé.

(45) Afin de déterminer le montant du droit nécessaire à l'élimination du préjudice subi par l'industrie communautaire, le Conseil a considéré, notamment, le prix de vente nécessaire pour couvrir les coûts de production supportés pendant la période du 1er juillet 1985 au 30 septembre 1986 et pour assurer aux producteurs communautaires une marge bénéficiaire adéquate, ainsi que l'écart entre cet objectif et les prix à l'importation de l'urée faisant l'objet d'un dumping dans la Communauté.

Après un examen approfondi de ces éléments, la Commission a jugé opportun, pour le règlement (CEE) no 1289/87, de fixer le montant du droit à un niveau permettant à un producteur communautaire représentatif d'équilibrer ses coûts sur la base des coûts de production supportés pendant la période du 1er juillet 1985 au 30 septembre 1986. L'industrie communautaire a fait valoir cependant que cela n'était pas justifié car, pour procéder à de nouveaux investissements, un producteur d'urée ou d'un produit similaire doit normalement avoir une marge bénéficiaire d'au moins 15 %. Étant donné la nature du produit concerné, le Conseil a estimé toutefois qu'il ne serait pas justifié d'ajouter une telle marge bénéficiaire au coût de production. En conséquence, il a été jugé raisonnable d'ajouter une marge bénéficiaire de 2,5 %, qui apparaît nécessaire pour permettre à un producteur d'urée de continuer à faire fonctionner une usine dans des conditions techniques modernes. Le producteur communautaire représentatif a été choisi en fonction de la dimension de la société, de la diversité, de l'âge et de l'efficacité des installations de production ainsi que des coûts de production globaux. Sur cette base, la Commission a calculé les taux de droit suivants sur le prix net franco frontière de la Communauté, non dédouané:

- Tchécoslovaquie: 19,5 %,

- République démocratique allemande: 17,5 %,

- Koweït: 17,5 %,

- Libye: 34 %,

- Arabie Saoudite: 40 %,

- Union soviétique: 45,9 %.

(46) Comme les exportateurs mentionnés ci-dessus de Tchécoslovaquie, de République démocratique allemande et d'Union soviétique sont les exportateurs exclusifs d'urée de ces pays et que leurs engagements portent sur toutes les exportations du produit originaire de ces derniers, toutes les importations d'urée originaires de Tchécoslovaquie, de République démocratique allemande et d'Union soviétique peuvent être exclues du droit définitif.

En ce qui concerne les importations d'urée originaires du Koweït, de Trinité et Tobago et de Yougoslavie, il a été établi que les exportateurs ayant fait l'objet d'une enquête étaient réellement les seuls exportateurs vers la Communauté et qu'il était improbables que dans ces pays d'autres exportateurs commencent à exporter vers la Communauté. En conséquence, ces pays peuvent également être exclus du droit antidumping définitif.

H. PERCEPTION DU DROIT PROVISOIRE

(47) Étant donné l'importance des marges de dumping qui ont été établies et la gravité du préjudice causé aux producteurs communautaires, le Conseil estime nécessaire que les montants garantis par le droit antidumping provisoire soient perçus, soit en entier, soit à concurrence du maximum du droit définitivement imposé si ce dernier est inférieur au droit provisoire. Toutefois, cette perception est jugée inappropriée dans le cas des produits originaires de Trinité et Tobago et de Yougoslavie en vue de l'octroi du traitement spécial et différentiel envisagé par l'article 13 du code antidumping du GATT.

I. PROCÉDURE

(48) Certaines objections ayant été soulevées au sein du comité consultatif quant à l'acceptation par la Commission d'engagements offerts par des exportateurs, la Commission a transmis au Conseil une proposition relative à cette question.

(49) Le Conseil a pris acte de l'ouverture d'autres procédures concernant le même produit originaire d'autres pays (voir considérant 36). De ce fait, il considère que les présentes mesures revêtent un caractère transitoire et devront faire l'objet d'un réexamen au terme des procédures en cours, A ARRÊTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:

Article premier

1. Il est institué un droit antidumping définitif sur les importations d'urée relevant des sous-positions 31.02 B et ex 31.02 C du tarif douanier commun, correspondant aux codes Nimexe 31.02-15 et 31.02-80, et originaires de Libye et d'Arabie Saoudite.

2. Les taux du droit antidumping définitif sur le prix net franco frontière de la Communauté, non dédouané, sont les suivants:

- Libye: 34 %,

- Arabie Saoudite: 40 %.

3. Les dispositions en vigueur en matière de droits de douane s'appliquent.

Article 2

1. Les engagements souscrits par les sociétés énumérées ci-après sont acceptés:

- Tchécoslovaquie:

Petrimex Foreign Trade Company Ltd (Bratislava),

- République démocratique allemande:

Chemie-Export-Import (Berlin),

- Trinité et Tobago:

National Energy Corporation of Trinidad and Tobago Ltd (Port of Spain),

- Koweït:

Petrochemical Industry Company (Koweït),

- Union soviétique:

Sojuzpromexport (Moscou),

- Yougoslavie:

INA Petrokemija (Kutina) et INA-Commerce (Zagreb).

2. Les enquêtes concernant les importations d'urée originaires de Tchécoslovaquie, de République démocratique allemande, du Koweït, de Trinité et Tobago, d'Union soviétique et de Yougoslavie sont clôturées.

Article 3

1. Les montants garantis par le droit antidumping en vertu du règlement (CEE) no 1289/87 en ce qui concerne les importations d'urée originaires de Libye et d'Arabie Saoudite sont perçus à concurrence des montants déterminés conformément à l'article 1er paragraphe 2.

2. Les montants garantis par le droit antidumping provisoire en vertu du règlement (CEE) no 1289/87 en ce qui concerne les importations d'urée originaires de Tchécoslovaquie, de République démocratique allemande, du Koweït et d'Union soviétique sont perçus à concurrence des montants n'excédant pas les pourcentages suivants sur le prix net, franco frontière de la Communauté, non dédouané:

- Tchécoslovaquie: 19,5 %,

- République démocratique allemande: 17,5 %,

- Koweït: 17,5 %,

- Union soviétique: 45,9 %.

3. Les montants garantis par le droit antidumping provisoire en vertu du règlement (CEE) no 1289/87 en ce qui concerne les importations d'urée originaires de Trinité et Tobago et de Yougoslavie sont débloqués.

Article 4

Le présent règlement entre en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Fait à Bruxelles, le 4 novembre 1987.

Par le Conseil

Le président

U. ELLEMANN-JENSEN